Toute la semaine, dans la continuité de la journée du 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, Angers French Tech laisse carte blanche à des femmes #Tech pour évoquer leur vision de la #Tech féminine et la place que ce milieu réserve aux femmes. Pour ce quatrième et dernier billet, c’est Corine, notre directrice aux relations internationales et aux partenariats, qui vous présente sa vision de la place des femmes dans le domaine #Tech.

Concernant, le 8 mars, je préfère que l’on évoque les droits fondamentaux des femmes plutôt que la journée de la femme.

La Tech, ce n’est pas un monde à part réservé aux hommes. Ni l’électronique. Ni le codage. Ni les métiers liés au développement au national ou à l’international… L’innovation, est un domaine qui évolue, qui crée, qui s’invente, se réinvente et qui façonne de nouveaux métiers chaque jour. La place des femmes y est aujourd’hui réduite, certes. Mais les choses bougent, doucement certes, mais elles bougent. Plus largement, la présence des femmes dans les directions, conseils d’administration et les Comex est encore (trop) rare. En 2020, des quotas pour que la parité soit appliquée en dit long. Le manque de données est encore trop souvent un échappatoire « complaisant ». Comment mesurer sans données ? Comment initier des actions en ce sens si nous n’avons toujours pas en 2021 des indicateurs fiables et constructifs dans la durée?

Dans les faits, la part des femmes dans la tech représenterait environ 18 % des effectifs. Les équilibres dans les équipes de direction dans des  secteurs comme l’électronique, le hardware ou, l’industrie sont plus qu’à la traîne. C’est dès le plus jeune âge qu’il faut casser cette image « virile et masculine » du secteur et attirer les femmes dans l’industrie. Elles seraient ainsi 38 % pour lesquelles l’appréhension du machisme et du sexisme constituerait un frein pour poursuivre une carrière dans une entreprise industrielle. Plus localement, on voit encore qu’au sein des promotions de nos grandes écoles, ce vivier pour les générations futures, les femmes y sont sous-représentées. Paradoxalement, en Inde et en Afrique, la dynamique positive des femmes ingénieures et volontaires est intéressante. En effet, s’orienter vers ces secteurs avec travail et détermination équivaut à une opportunité pour évoluer différemment. C’est un formidable levier d’intégration.

La société a tendance à conforter, de façon consciente ou inconsciente, le stéréotype qui pousse les hommes à s’orienter vers la Tech et qui tend à éloigner les femmes de ce domaine. Idéologique. Culturel. Familial. Traditions patriarcales. Parce que l’on est une jeune fille, l’orientation est toujours différente de celle des garçons. On nous encourage à être douce et courtoise, effacée et sage ; transposé à la vie professionnelle les freins persistent… Une certaine forme de conservatisme subsiste. Les femmes sont en effet facilement sujettes au sexisme sournois, subtil voire, amical. Il s’agit aussi pour les hommes de prendre en considération leurs actes au quotidien. Les freins posés, Les remarques parfois blessantes, souvent humiliantes. L’ignorance que certains portent encore aux avis portés par une femme appartiennent encore à notre quotidien professionnel. Tant que persistera le manque de considération des hommes, cet entre-soi masculin qui limite l’émergence de talents féminins, alors nous serons loin du but. En 2021, il n’est pas rare d’entendre que nous menons une carrière d’homme.

Travailler dans un environnement majoritairement masculin quand on est une femme provoque réactions et comportements divers. Certaines en subissent les affres, d’autres en font une force. Aujourd’hui, aucun doute, pour qu’une femme réussisse et qu’elle soit jugée comme compétente et reconnue, elle doit travailler deux fois plus qu’un homme. J’ai toujours évolué dans un monde à majorité masculine, et la citation de Simone Veil résonne souvent en moi :  « Ma revendication en tant que femme, c’est que ma différence soit prise en compte, que je ne sois pas contrainte de m’adapter au modèle masculin ». En réalité, trop souvent encore aujourd’hui nous sommes contraintes de nous adapter au modèle masculin. Plusieurs années de mon enfance passées à l’étranger, les femmes qui m’ont accompagnées et qui m’inspiraient dès mon plus jeune âge étaient Rosalind Franklin, Rosa Parks, Simone de de Beauvoir, Gisèle Halimi, Indira Gandhi, Helena Rubinstein, Marie Curie et Simone Veil bien entendu. Ces femmes, aux destins exceptionnels me fascinaient. La marraine de ma promotion en fin de cursus était Mercedes Erra, une femme éminemment inspirante et féministe qui a eu pour discours : « affirmez-vous et ne renoncez à rien ; ni à votre vie professionnelle ni à votre vie familiale ». 25 ans plus tard, je partage ses propos. Elle avait vu juste : je n’ai renoncé à rien. Les femmes sont particulièrement résilientes malgré des parcours de vie pas toujours simples à gérer. Il faut s’imposer, trouver un équilibre de vie, ne pas se poser de questions, ne pas culpabiliser par rapport aux enfants : ce n’est pas la quantité de temps que l’on passe à leurs côtés qui sera déterminante mais sa qualité. Cette culpabilité est amplifiée par la monoparentalité.

C’est évidemment par l’éducation non genrée à destination des hommes et des femmes dès le plus jeune âge que les choses évolueront dans le bon sens. Ne pas entrer dans des cases ; trouver en soi la force, le courage, l’exigence, la confiance, et les rêves qui nous permettent de rester debout en marge de notre vie de femme, de mère et de professionnelle accomplie. Notre force est de ne jamais se satisfaire de ce que l’on est mais de toujours tenter d’aller plus loin. Ne jamais renoncer. Ne pas avoir peur de vouloir décrocher la lune. Les femmes étudient, enfantent, travaillent, se réalisent, entreprennent, éduquent… Elles sont tellement plus exposées à la précarité que les hommes ; trop souvent démunies, sans pension alimentaire, devant cumuler plusieurs emplois pour assurer leurs arrières dignement dans une société qui ne correspond pas vraiment aux rêves d’enfance. Brisons les tabous : une femme sur huit fera face à un cancer du sein et là encore, même si tout ce qui ne tue pas rend plus fort, nous sommes face à nous-mêmes et notre force et notre résistance, nous les puisons au plus profond de nous. Après le combat face à la maladie, il y a un avant et un après. Et la résilience y a tout son sens, qui plus est quand on considère en mode guerrière que son activité professionnelle est un soutien de poids dans la guérison.

Le féminisme c’est un esprit d’indépendance avant tout et en 2021, il se doit d’être décomplexé. La parité, la mixité, l’équité sont l’affaire de tous. A mon sens et l’avenir nous le dira, pour que le monde de demain soit meilleur que le monde d’aujourd’hui, le développement passera nécessairement par les Femmes.